MARIE-JÉSUS DIAZ
BLANC À OMBRER

Blanc à ombrer

Le ciel, dans les serres de Monsieur Morelli, à Vitry-sur-Seine, culmine à cinq mètres d’altitude. Puis au terme de sa rapide courbe descendante, il rejoint à nos pieds le bord du monde, où, tranchés net par cet horizon à porté de main, s’arrêtent carrés de fleurs et alignements de plantes en pots. Mais Monsieur Morelli cultive aussi des carrés de ciel bleu, juste au-dessus de nos têtes, derrière le vitrage des serres. C’est là qu’il sème le blanc: le blanc de Meudon, le blanc d’Espagne, voire le blanc de chaux? Allez savoir ce qu’il met dans la mixture laiteuse qu’il pulvérise sur l’autre face du ciel, une ou deux fois l’an, sous l’appellation de “ blanc à ombrer” .

Entre les montants des châssis de ses grandes serres, il plante, tête en bas, des champs de coton dans des espaces désertés par le vent. Il offre le ventre transparent du ciel en pâture statique à de vastes troupeaux de moutons. Il enfarine en plein vol des fritures de minuscules poissons volants.
Il ne laisse à personne le soin de jeter entre le soleil et ses fleurs un climat intemporel fait d’une multitude de nuages infimes. D’étendre sur elles un été sans fin, traversé d’une pluie de météores dont les tracés d’aiguilles semblent vitrifiés dans la densité du bleu.
De poser sur toutes choses une saison immobile dans l’épaisseur de laquelle, pollens, spores, germes ou graines en suspension, n’espèrent plus qu’en la grêle ou la pluie pour rejoindre, en ruisseaux noirâtres, la terre et s’insérer de nouveau dans le temps.

Max-Henri de Larminat

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Blanc à Ombrer (2006), travail en couleur sur les vitrages d’une serre couverts de blanc à ombrer, jeu de rythmes blancs sur fond de ciel bleu. 16 images. Tirages numériques disponibles en A3 et A2.
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© Marie-Jésus Diaz